Mourir, cela n'est rien, mourir, la belle affaire
Dans Earthdawn, l’on tombe dans l’inconscience lorsque les
dégâts atteignent le seuil d’inconscience, et l’on meurt lorsqu’ils atteignent
le seuil de mort (PV=0). Il n’y a pas de mécanisme qui préviennent cette mise à
mort (pas de point d’héroïsme, pas de statut « out » à 0 PV, etc.)
L’architrame du personnage se brise alors, s’effiloche, et
son esprit fuit son corps et voyage dans l’astral jusqu’au Royaume de la Mort.
Toutefois, des charmes de sang, des baumes, des serments, de
la magie nécromantique, des pouvoirs d’Horreurs peuvent maintenir plus ou moins
longtemps un esprit dans le monde des vivants, dans son corps.
Il est dit au MJ que la mort dans ED est le plus souvent
permanente et sous-entendu que la résurrection est très rare, très difficile et
très coûteuse. C’est aussi ce que disent les narrateurs fictifs des
suppléments. Pourtant, les références incessantes à la résurrection,
justifiable au vu du temps de création et de progression nécessaire (plus de 16
millions de PL au cercle 15 !), pourraient faire croire que c’est bien
plus fréquent…
J’interprète ses signaux comme une présentation chair et
sang du jeu (grim & gritty) dans
le ton des jeux de dungeon crawling à
forte attrition, contredite par des mécanismes de Trompe-la-Mort assez faciles
d’accès aux alentours du 6e Cercle (surtout pour le Guerrier) et
associée à une incitation côté MJ à sauver les PJ par un artifice peu crédible
(le mystère des grâces de la Mort).
Ce discours schizophrène et ce rattrapage « ludiste »
limite méta-jeu ne me satisfont pas et je préfère soit un discours cohérent (héroïque
chair et sang à la Chtulhu OU épique –que je préfère), soit une logique interne
expliquant les Trompe-la-Mort (principe des retraites du Destin de Tranchons & Traquons) et/ou
facilitant l’intégration de nouveaux personnages (principe de la Patrouille et
conseils aux MJ d’Oltréé !).
Problématique de la mort d’un personnage
La mort pose quatre problèmes :
1. La
prudence des joueurs qui ne veulent pas perdre leur perso qui a évolué à la
dure pendant un bon bout de temps, et donc une façon de jouer beaucoup plus
timorée. Exit les moments de panache, les prises de risque grandioses…
2. La
perte d’un personnage ayant de la bouteille pour le PJ et d’un personnage
peut-être centrale pour des intrigues du MJ ;
3. La
création longue d’un nouveau personnage, surtout si on le « monte »
au niveau de puissance des autres PJ et si on intègre son background dans la
campagne. C’est d’autant plus gênant pour des joueurs trentenaires qui ont peu
de temps de préparation et de jeu ;
4. L’intégration,
possiblement très artificielle, d’un nouveau-venu dans le groupe des vétérans
et dans l’architrame de leur groupe (cf. plus bas l’architrame de groupe et la
mort).
--
Voyons déjà ce que propose Earthdawn sur la gestion de la
Mort :
Tromper la mort
La légende raconte que c’est grâce à l’enfermement de la
Mort sous la mer des Enfers par les Passions que l’esprit d’un mort peut
revenir dans son corps.
Concrètement, un personnage peut tromper la mort lorsque ses
PV atteignent zéro si :
1. Il
utilise un charme de sang de Trompe-la-Mort avant les dégâts fatals (dernier
jet de récupération + 6 niveau). 450 PA, peu fréquent ;
2. S’il
possède le Talent d’Ultime Sursaut (Guerrier 6e Cercle, Chasseur
d’Horreurs 6e Cercle, Sorcier 10e Cercle, Maitre d’armes
12e Cercle, Navigateur aérien 12e Cercle, Cavalier 13e
Cercle, Troubadour 14e Cercle), utilisable tant que l’on a des jets
de récupération. A la mort, un test d’Ultime sursaut consomme un jet de
récupération et rend son résultat en PV. ;
3. Pour
le Guerrier, l’aptitude de Résurrection personnelle de 13e Cercle,
qui permet de bruler définitivement des points de Karma pour rendre le test
d’Ultime sursaut efficace à 100% ;
4. Si
l’on oint son corps dans les heures qui suivent sa mort (niveau
constitution/volonté heures) d’un onguent de la dernière chance (utilisation
des jets de récupération restant, voir un jet de récupération gratuit. On peut
en appliquer toutes les heures. 600 PA, très rare.
5. Les
frères de sang/personnes liés par le sang peuvent ressusciter leur frère grâce
au Talent de Partage de sang : ils peuvent tenter un test jusqu’à rang
jours après la mort et tenter d’absorber le surplus de dommage pour ressusciter
leur âme sœur.
En gros, un Guerrier du 6e Cercle équipé de
quelques milliers de pièces d’argent et avec des amis aura très peu de risque de mourir. Il n’en est pas de même des autres
disciplines, surtout les non guerriers car ces artifices sont basés sur les
jets de récupérations, spécialité de la caste guerrière ou des élémentalistes.
6. Sinon,
il faut employer des sortilèges très puissants de résurrection, donc connu par
de très rares magiciens :
·
Prison de l’âme, nécromancie de 10e
cercle, pour capturer l’esprit d’un mort de quelques jours (rang incantation)
dans son corps pendant quelques heures (rang incantation), permettant un répits
pour tenter de le sauver.
·
Retour à la vie, sorcellerie de 10e
cercle, lors d’un rituel durant autant de jours que depuis que la personne est
morte, avec un risque qu’un autre esprit vienne posséder le corps.
Il existe d’autres sorts qui permettent d’animer des
cadavres ou de créer la vie, mais ils ne permettent pas de redonner la vie à
une personne précise :
·
Création de la vie, nécromancie de 9e
cercle, pour rang + 7 ans ;
·
Zombi, nécromancie de 9e cercle, pour
rang jours ;
·
Animation des morts, nécromancie de 10e
cercle, pour rang + 5 jours, voire un an et un jour avec de la magie de
sang ;
·
Altération de la vie, nécromancie de 11e
cercle, pour rang + 7 ans ;
·
Vie impie, nécromancie de 11e cercle,
pour rang années.
Enfin, les membres d’un groupe de Maîtres peuvent être mis
en stase pendant un an et un jour par leurs camarades s’ils sont morts depuis
moins de 24 heures (aide de jeu amateur). Il est ainsi possible de tenter de
les faire revivre pendant ce laps de temps.
Rencontrer la Mort… et revenir ?
Ensuite, il faut aller dans le royaume de la Mort et
négocier avec elle.
Le mystère des grâces de la Mort
7. Le
narrateur fictif raconte que certaines personnes ont vu la Mort leur apparaître
et leur déclarer que leur heure n’était pas venu. Bref, un Deus ex machina du MJ sans réelle autre justification que de
refuser la mort du PJ pour divers raison…
Chercher les esprits des morts auprès de la Mort
8. Selon
le narrateur fictif, des légendes racontent que quelques personnes sont allés
dans le Royaume de la Mort pour y « arracher » l’esprit de leur
proche, en négociant avec Elle, en faisant de grand sacrifice. Cela serait
possible quand la Mort « dormirait ». Les vivants pourraient alors
visiter magiquement la mascarade de ses rêves, se mêler à la danse des esprits
masqués et essayer de retrouver un esprit en particulier, au risque de ramener
le mauvais esprit… si l’on revient !
Servir les Passions
Une légende et des récits racontent que Thystonius alimente
un bûcher funéraire pour faire revivre les guerriers du Paradis des épées qui
se battent éternellement dans les monts Scol contre les créatures qui tentent
de passer dans la réalité de Barsaive.
EDIT : alternative des points de Passions avec l'aide de jeu des shadowforum "Favoriser un jeu héroïque" de Mahar et la Danse des Passions et leurs bénédictions de Notaure pour tenter de négocier avec les Passions sa survie.
Ailleurs dans le monde
En Créana (Egypte), une Horreur bloque le passage entre le
Royaume des morts local (les Terres de l’Ouest) et le monde des vivants,
obligeant les esprits des morts à retourner dans leur corps sous la forme de
momies (décérébrées donc stupides) ou de cadavéreux (avec leur conscience et
leur mémoire originelles).
Là-bas, le Pharaon meurt tous les hivers et revient à la vie
au bout de 19 jours grâce à Tebru, la Passion noire du blé et de l’orge, et à
un rituel complexe.
Proposition d’améliorations
L’architrame de groupe et la mort
Dans l’EDC, une architrame de groupe disparait à la mort
d’un de ses membres si le rituel n’est pas immédiatement ré-exécuté. Dans la 4e
édition, cela n’est plus nécessaire.
Toutefois, tous nouveaux membres doit exécuter le rituel
pour se lier à l’architrame de groupe.
Or e type de rituel implique une grande confiance entre ses
membres, confiance qui ne se gagne généralement qu’après de longues et
conséquentes aventures. Il est donc peu crédible qu’un nouveau personnage se
joigne à un groupe existant.
Un moyen de supprimer ce frein est de réinterpréter
l’architrame de groupe : considérons que cette architrame ait une sorte de
conscience propre et qu’elle choisisse naturellement les personnes destinées à
la rejoindre en établissant un filament entre elle et leur architrame. De même,
la mort de tous ses membres n’entrainerait pas sa disparition car elle est liée
à l’architrame du monde tant qu’il reste des souvenirs, des légendes et des
témoignages physiques que le groupe de Héros a un jour existé. On se rapproche
du concept de groupe de niveau
« Gardien » de Scorpinou et Notaure (mais sans critère
d’ancienneté –50 ans–, de nombre –30 personnes– ou de qualité de ses membres
–Gardiens–) et de la Patrouille d’Oltréé !
du Grümph.
Les frères de sang
Lors de la création du personnage, par exemple via les
chemins de vie (par exemple aux phases Enfance, Aventure et Trauma), le joueur
crée 3 perso prêt-à-jouer sous forme d’un nom, d’un concept, d’une relation
avec son perso principal. Ce dernier est régulièrement en contact avec ces
PNJ-qui-deviendront-peut-être-des-PJ, via des courriers où il leur raconte ses
aventures, via les phases d’hiver (si jeu en saison) ou via un serment de sang
d’un nouveau type, calqué sur celui de Frères de sang : les Amis de sang.
Le serment d’Amis de
sang peut-être contracté plusieurs fois et ne cause qu’un point de sang à
chaque fois, et 3 blessures de sang pendant 3 ans et 3 jours en cas de
trahison. Il prend la forme d’un tatouage d’une créature ailée que l’Ami peut
invoquer pour qu’il porte un message. Cette créature de sang retrouvera
toujours l’autre Ami si celui-ci est vivant, mais il se déplace à la vitesse de
vol d’une créature normale. Le serment crée aussi un sens de Lien empathique
entre les deux Amis, qui sauront notamment si l’un d’entre eux est en grave
danger ou s’il meurt.
Ainsi, le joueur pourra, à la mort de son personnage
principal, faire venir l’un de ses autres personnages qui connaitra déjà les
compagnons et l’histoire de feu son ami. Et peut-être même que l’architrame de
groupe se sera liée à lui via feu l’ancien personnage…
On peut aussi imaginer que lors de sa mort, le perso ait
recours à la magie sacrificielle pour créer une vengeance de sang que son Ami
portera, ou encore un objet magique dont il sera l’héritier.
Par contre, si ce perso meurt aussi, à moins qu’il n’ai lui
aussi 2 autres Amis de sang…
Alternatives:
La retraite
Solution narrative et dramatique (cf. http://qui.revient.de.loin.blog.free.fr/index.php?post/2015/Reconversion-et-retraite-des-H%C3%A9ros-fatigu%C3%A9s).
L’état de fantôme
Solution ludique, pour qu’un joueur continue à jouer jusqu’à
la fin d’un scénario.
Instituer la résurrection
Solution épique (et créatrice de rebondissement) à la façon
de 13e Âge : un
personnage peut tenter une résurrection une fois par Cercle, au maximum 5 fois,
tant que son corps est présent, chaque fois étant plus long (durée du rituel, récupération
après le retour à la vie), plus difficile (à la fin, seulement 50% de chance
que cela marche) et plus dangereux pour le résurrecteur (affaiblissement et à
la fin, mort).
On pourrait transposer en disant que grâce à
l’emprisonnement de la mort, il est possible de tenter 8 résurrections, une
fois par Cercle, chaque fois d’une façon différente (la Mort se lasse…).
Métajeu
Le joueur dont le personnage est mort devient assistant du
MJ pour gérer des PNJ, l’environnement, etc.
Sources
Earthdawn:
Sources officielles :
RDM EDC p.
133 ; RDJ EDC, Legends of Earthdawn,
vol. II: The book of
exploration (Le Paradis des épées, La Mascarade des rêves de la Mort), The Theran empire, RDJ ED4.
Sources amateur : Groupe
d’adeptes de Scorpinou et Notaure.
Autres :
Tranchons &
Traquons 2, Oltréé !